Isabelle qui se tient sur les mains dans le milieu d'une route désertique dans la nature.

Les journalistes bientôt écrasés par les influenceurs web ?

Vous les avez tous déjà repérés : les stars de télé-réalité avec leurs blanchisseurs de dents. Les blogueuses beauté et leurs thés amincissants. Les instagrameurs et leurs marques de vêtements que personne ne connait encore… Les influenceurs web ont envahi nos réseaux sociaux. Et les entreprises en profitent pour faire leur promotion à moindre coût. Mais qu’en est-il des métiers qui font de la publicité et du marketing web leur métier, les pro de la relation presse, les journalistes ?

À mi-chemin entre célébrité et girl-next-door

Un des piliers du marketing web, et de la promotion à travers des célébrités notamment, est la confiance et l’authenticité. Le public doit croire que la personne qui représente un produit est convaincue par les bienfaits dudit produit et qu’ils l’utilisent dans leur vie quotidienne. Le principe de la célébrité qui vante les mérites d’un produit incite le consommateur à acheter l’objet de la publicité pour se rapprocher de la personne qu’il ou elle adule.

La vague de popularité sur laquelle surfent tous ces nouveaux influenceurs web entraîne un changement dans les attentes du consommateur. Il ne cherche plus à ressembler à la personne qu’il admire, il tend plutôt l’oreille vers son youtubeur préféré qui teste en direct la qualité du nouveau Red Dead 2. Le consommateur est témoin de l’utilisation du produit.

Ces influenceurs sont gage de confiance. Ils sont notre bonne copine qui nous donne son avis sur tel ou tel produit. Nous nous identifions plus facilement à eux. Nous ne nous rendons pas forcément compte que pour promouvoir un produit, ils sont payés et que leur avis n’est pas toujours aussi authentique que lorsqu’ils avaient 93 abonnés sur Instagram. Cette zone grise fait justement partie de la stratégie marketing web des entreprises qui cherchent à rentabiliser leur publicité. Les célébrités « traditionnelles » ne font pas partie de notre quotidien, alors que ces influenceurs sont constamment sous notre nez. Nous les voyons tous les jours, les connaissons presque autant qu’une personne avec qui nous parlons au bureau. Ils sont les « nous » version célèbre, ils sont les « nous » qui partagent « notre » vie sur les réseaux sociaux. Un lien s’est créé entre nous et eux à travers les médias et nous leur faisons confiance.

L’appât du gain

Nombreuses sont les entreprises qui n’ont pas sauté le pas et ne savent pas comment se positionner face à l’émergence des réseaux sociaux et plus précisément au besoin nouveau d’assurer une présence sur ces réseaux afin de rester compétitifs. Il ne suffit pas d’adapter le format d’une annonce publicitaire pour la mettre sur Facebook. C’est toute une démarche qu’il faut adapter, de nouveaux acteurs qu’il faut utiliser, c’est une nouvelle façon de communiquer. Les entreprises qui nous intéressent, celles qui ont su s’adapter et traire la vache à temps ont compris que la popularité du produit ne dépend pas tant du marketing web, mais de l’avis du consommateur. Et c’est avec des vidéos et des posts sponsorisés que cela fonctionne.

Isabelle Fabre assise dans l'eau avec un kite.
Isabelle Fabre lors d’un camp de kitesurf à Dakhla, Maroc. © Isabelle Fabre

Vos influenceurs web reçoivent des produits, perdent toute forme de déontologie et nous achetons leurs produits parce qu’ils ne sont pas les objets de publicité auxquels nous nous attendons. Mais en y réfléchissant, peut-on leur en vouloir ? Si des dizaines de marques se pressaient devant nos portes pour nous proposer une collaboration, des marques dont nous achetons les produits depuis des années, aurions-nous refusé ? N’aurions-nous pas peut-être fermé les yeux sur deux trois défauts ? Ne serions-nous pas un peu plus indulgents parce que nous sommes désormais « de l’autre côté » ?

En tout état de cause, les influenceurs web et les journalistes ne sont pas si différents. Ils apprennent à connaitre un produit, une activité, un lieu et en font une critique. Ils sont aussi corruptibles les uns que les autres. Qu’ils dépendent d’un journal, d’une agence ou d’une marque, ils tentent de gagner leur vie et tant mieux si leur morale leur permet de rester droits dans leurs bottes. Toutefois, leur plus grande différence est leur public.

Un journaliste dépend du domaine sur lequel il écrit alors qu’un influenceur dépend de son public. Très peu d’influenceurs de la première vague (années 2000-2010) ont su rester pertinents, beaucoup n’ont pas grandi avec leur public et les nouvelles générations ne sont pas intéressées par les sujets d’il y a dix ans. Leur niche n’est pas un domaine, c’est une génération à un âge donné. Le journaliste est ainsi plus stable qu’un influenceur.

Alors oui, les influenceurs web sont tout feu tout flamme. Ils nous inondent avec leurs posts aux sponsors plus ou moins dissimulés et nous nous laissons influencer avec plus ou moins de facilité et de conscience. Les marques en raffolent et ils font évoluer le marketing web. Ils font évoluer la façon de promouvoir. Mais, très vite, ils devront eux aussi s’adapter et ce n’est qu’alors que nous comprendrons réellement la valeur de leur influence. L’évolution de leur public, notre prise de conscience et notre maturité, est l’émergence des nouveaux médias à laquelle les journalistes ont dû faire face voilà quelques années. Bien que les influenceurs web semblent marcher sur les plates-bandes des journalistes, leurs objectifs, leur rôle et leur public cible sont bien distincts. Ainsi, ils ne les remplaceront très probablement jamais.

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